Le Burkina Faso, le pays des hommes intègres, vient d’enregistrer un coup d’Etat. C’est le moins que l’on puisse dire. En fait, tout a commencé le dimanche 23 janvier, lorsque des coups de feu ont été entendus dans plusieurs baraques de la ville de Ouagadougou, mais aussi à Kaya et Ouahigouya. Finalement, ce qui était présenté comme une mutinerie ou un mouvement de mécontentement s’est rapidement transformé en coup d’État puisque 24 heures plus tard, le chef de l’État, Roch Marc Christian Kaboré, a été arrêté et conduit dans un camp militaire. Ce que tout le monde craignait depuis longtemps est arrivé. L’armée a pris le relais. Nous sommes loin de l’année 2015 où la population, comme un seul homme, s’est opposée au coup d’État du général Gilbert Diendéré. Je dis cela parce que je constate que la société civile, qui aurait pu être le fer de lance de la résistance, est également divisée. Il y a ceux qui, par principe, s’opposent à toute prise de pouvoir par les armes. Il y a aussi ceux qui, par opportunisme ou par calcul politique, ont récemment appelé l’armée à assumer ses responsabilités. Vous conviendrez avec moi que cette dernière catégorie de militants a applaudi sauvagement lorsqu’ils ont appris que les militaires avaient renversé Roch. Je ne suis ni dans l’un ni dans l’autre domaine. Personnellement, je suis du côté du peuple. Peu m’importe qui présidera au destin de notre pays.
Il ne s’agit pas seulement d’enlever Roch
L’important est de donner la priorité aux intérêts des personnes martyrisées depuis plusieurs années. Je dis cela parce que très souvent les militaires, une fois au pouvoir, commencent à tellement s’embourgeoiser qu’ils finissent par tomber dans les mêmes pièges que ceux qu’ils ont chassés. Les exemples sont si nombreux sur le continent que je n’oserai pas les citer exhaustivement, sous peine d’essoufflement. Donc, pour moi, il ne s’agit pas seulement de faire partir Roch. Son successeur n’a qu’à faire mieux que lui pour que nos compatriotes qui ont fui leurs villages respectifs puissent revenir au plus vite et y vivre en paix. C’est actuellement la priorité absolue des Burkinabè. Cela dit, je reste convaincu que la lutte contre le terrorisme, avec les derniers événements, risque de subir un coup sévère. Je dis cela parce que je sais que les choses vont ralentir jusqu’à ce que de nouvelles institutions soient établies. Ce qui peut prendre au moins deux, voire trois mois. Tu vois? Ce n’est pas aussi simple que certains essaient de vous le faire croire. Je croyais que notre pays, après le soulèvement populaire d’octobre 2014 qui a mis fin au régime de Blaise Compaoré, était revenu sur le chemin de la démocratie. Mais avec ce coup d’État, n’avons-nous pas reculé ? En tout cas, je me rends compte, à l’analyse, qu’aucun président civil de notre pays n’a pu mener à bien son mandat. Je commence par Maurice Yaméogo qui a été bouleversé par un soulèvement populaire. Puis vint Michel Kafando qui fut destitué par les militaires avant d’être réintégré. Et enfin Roch Marc Christian Kaboré qui n’a pas pu terminer son second mandat. Tu vois? Tout se passe comme si les militaires burkinabè voulaient jouer les premiers rôles dans ce pays en termes de gestion du pouvoir. Mais il est vrai que les civils, par leur mauvaise gestion, leur ont souvent fourni des arguments pour justifier leur irruption sur la scène politique. Moralité : la seule parade notable est la culture permanente du gouvernement vertueux, jalousement soutenu par le peuple.
« L’idiot »