Dans son discours à la Nation du 25 novembre, le président du Faso Roch Kaboré a promis de rebattre les cartes au sommet de l’Etat, en formant un gouvernement resserré avec moins de ministres, pour une meilleure coordination et une plus grande efficacité de l’action gouvernementale. Eh bien, c’est maintenant chose faite avec la nomination ultérieure de Lassina Zerbo au poste de Premier ministre, suivie de la formation de la nouvelle équipe gouvernementale, dévoilée hier soir. C’est un gouvernement plus réduit de seulement 24 ministres et deux sous-ministres, qui remplace « l’armée mexicaine » de Christophe Dabiré, dont 18 des 34 soldats qu’elle comptait ont été, pour ainsi dire, démobilisés, tous sacrifiés sur l’autel de l’austérité. et pour sauver la tête du président, plus que jamais sur place pour son laxisme réel ou prétendu. Roch Marc Christian Kaboré s’est enfin débarrassé des personnalités les plus menacées de son entourage, notamment celles dont les noms étaient associés à diverses malversations ou méthodes suspectes de gestion des affaires publiques. Au moins trois poids lourds du gouvernement sortant sont tombés à l’eau, dont Alpha Barry des Affaires étrangères, Clément Sawadogo de l’Administration territoriale et Eric Bougma des Infrastructures. Sont également absents le ministre de l’Action sociale, Marie Marshall Ilboudo, Arouna Kaboré du Commerce, Salifou Ouédraogo de l’Agriculture et Siméon Sawadogo de l’Environnement, pour n’en citer que quelques-uns. Quinze ministres de l’ancien gouvernement ont survécu au séisme et sont maintenus à leurs postes et conservent leurs portefeuilles respectifs. Les dix nouvelles recrues rejoignent ou accueillent pour former l’équipe de choc du « capitaine » Lassina Zerbo, investie de la difficile mission de trouver des solutions adéquates aux problèmes complexes auxquels le Burkina Faso est actuellement confronté. On note au passage le retour de l’ancienne ministre des Finances, Rosine Coulibaly et de celle de la Santé, Smaila Ouédraogo, respectivement aux Affaires étrangères et à l’Environnement, et l’arrivée pour la première fois de Martine Kouda, connue pour sa rigueur et sa maîtrise de la dossiers de son ministère, en tant que ministre délégué auprès du ministre des Finances. Le Premier ministre, qualifié de technocrate pragmatique et extraordinairement efficace, doit rapidement démontrer qu’il est à la hauteur de cette verve sémantique en remplissant correctement sa mission herculéenne, pour mettre fin au scepticisme de plus en plus répandu de ceux qui, déjà en 2015, disaient de façon dramatique pressentant que son patron en tant que président ne pourra pas conduire le pays vers un bon port. Il est vrai que moins de ministres et de ministères ne signifie pas forcément plus de rigueur dans la gestion, moins de dépenses publiques ou moins de reculs sur le théâtre des opérations ; il est vrai aussi qu’il existe un risque de scandale parmi les caciques du parti au pouvoir qui ont le plus souffert de cet écrémage. Mais cette répression était absolument nécessaire dans ce contexte de crise pour mettre moins d’acteurs dans le cercle, et rendre le processus décisionnel plus cohérent et fluide. Pour le reste, les déçus et les décapés peuvent être « recyclés » comme il est d’usage dans d’autres institutions publiques ; histoire de la pacification des différents clans avant les échéances électorales de 2025. En attendant, et le plus urgent, est de se mettre sur le pied de guerre et en ordre de bataille pour sauver la maison commune du danger terroriste, et de la même occasion, de recueillir les défis titanesques de la lutte contre la corruption et les détournements effrénés de fonds publics par certains agents cupides de l’Etat. Certains diront que c’est plus facile à dire qu’à faire, et que ce nouveau gouvernement ne pourra à lui seul apporter la paix et la tranquillité dans les régions sanglantes du pays. Il est évident que l’équipe du géophysicien et Premier ministre Lassina Zerbo, quel que soit son volontarisme et même avec tous les moyens du monde, ne pourra pas installer de détachements militaires dans tous les villages et villes de culture menacés par les terroristes. Par conséquent, la meilleure stratégie pour combattre ces petits groupes furtifs serait de former, d’armer et d’encadrer les jeunes dans les localités assiégées et d’inviter les populations des zones rurales à utiliser leur peur comme source de courage pour ne pas céder le terrain aux assaillants. à la moindre alarme… Machiavel a déclaré que « chaque fois que nous reportons une confrontation que nous savons inévitable, nous la reportons à notre désavantage ». Les « Etalons » du natif de Bobo-Dioulasso seront jugés sur leur capacité à faire pression sur les groupes armés et à les pousser dans leurs derniers retranchements, avant d’envisager la fameuse table de négociations qui s’achèvera inévitablement. crise. Pour ce faire, ils auront nécessairement besoin non seulement de l’ardeur combative des SDF et de leurs auxiliaires, mais aussi et surtout de la mobilisation générale, notamment des populations urbaines qui, jusqu’à présent, continuent d’une manière étonnamment insouciante à « bungabunga » en brousse et dans les discothèques, malgré la situation sécuritaire particulièrement délétère dans le pays. Il serait illusoire de croire que l’on puisse gagner cette guerre en comptant uniquement sur le patriotisme et la détermination des gouvernants car, sans la participation et la contribution de tous à la défense de la patrie, nous nous réveillerons un matin complètement abasourdis par la disparition des principes fondateurs républicains du Burkina Faso, en raison de l’occupation inexorable de portions entières de notre territoire par des groupes djihadistes.
Hamadou GADIAGA