Plus de dix jours après l’attentat d’Inata au Sahel qui a causé la mort d’une cinquantaine de personnes, le 25 novembre le président du Faso, Roch Marc Christian Kaboré, s’est adressé à ses compatriotes, après une brève allocution le 17 novembre 2021 à l’issue d’une Conseil des ministres où il a promis « des sanctions disciplinaires sans exception » suite aux dysfonctionnements détectés dans l’armée. Ce discours, il faut le rappeler, intervient à la veille d’une gigantesque manifestation que les organisations de la société civile et les partis politiques d’opposition entendent organiser, appelant ouvertement à la démission du chef de l’Etat. Cet événement en perspective, pourtant interdit par les autorités, est un énième après ceux déjà enregistrés dans la région. On oublie volontiers le cas de Kaya où le convoi militaire français qui partait pour Gao a été bloqué. Le moins que l’on puisse dire, c’est que cette marre des manifestants est compréhensible. Depuis l’arrivée au pouvoir de Roch Marc Christian Kaboré, le Burkina Faso est tombé dans l’œil de la tempête terroriste. L’Etat a progressivement perdu le contrôle d’une grande partie du territoire national, donnant aujourd’hui l’impression que les forces du mal ont encerclé tout le pays.
Pour beaucoup de Burkinabè, l’homme n’a pas encore revêtu l’uniforme d’un chef de guerre
La psychose a donc progressivement conquis toute la population déjà traumatisée par la danse incessante des cercueils des Forces de Défense et de Sécurité (FDS) qui périssent au front et par l’errance sur les chemins de l’exil, de milliers de personnes expulsées de leur villages respectifs. . La goutte d’eau qui semble avoir fait déborder le vase est la récente boucherie d’Inata où une cinquantaine de gendarmes ont été tués si l’on s’en tient aux chiffres communiqués par les autorités. Et alors que les portes de l’apocalypse semblent se rapprocher, le chef de l’État, qui a la responsabilité constitutionnelle de garantir l’intégrité territoriale, semble ne pas avoir pris la vraie mesure du danger. Pour beaucoup de Burkinabè, l’homme n’a pas encore porté l’uniforme d’un chef de guerre qui joue pour la survie de son territoire. Certains l’accusent d’ailleurs d’avoir contribué à gâcher la situation lui-même à travers son gouvernement de complaisance basé sur le laissez-faire, l’inaction face à des détournements de fonds publics, des commotions cérébrales, des nominations à des postes de responsabilité, d’amis ou de membres de la famille. Face à cette avalanche de critiques, la première question que l’on peut se poser est la suivante : dans quel état d’esprit se trouve le président du Faso aujourd’hui ? Sans être dans le secret des dieux, il est difficile de répondre avec certitude à cette question. Cependant, on peut penser que l’homme doit être très mal à l’aise mais certainement pas au point de ramasser, comme le souhaitent les manifestants, ses affaires du palais Kosyam. Mais il pourrait en être autrement si le climat socio-politique devait continuer à se dégrader avec la possibilité d’orages annoncés par le chef de l’opposition politique (CFOP) qui, rappelons-le, y a lancé un ultimatum Bientôt au chef de l’Etat de trouver de sérieuses et des solutions concrètes à l’équation de la sécurité au Burkina Faso.
La détérioration interne de la situation politique risque de nous faire tomber dans le piège terroriste
Mais on se demande si la démission du président Roch Marc Christian Kaboré peut vraiment être la solution à la crise sécuritaire. Rien n’est moins sûr, car, dans ce cas, le Burkina Faso pourrait se retrouver dans le trou noir du syndrome malien qui a conduit à l’effondrement du régime d’Ibrahim Boubacar Keita (IBK) que l’installation d’un pouvoir militaire au palais de Koulouba sans réel remède au problème de sécurité. Tout le mal que l’on peut espérer, alors, c’est que l’appel à la démission de Roch Marc Christian Kaboré, fouette l’orgueil du chef de l’Etat à secouer et secouer le cocotier. L’homme peut encore laver son honneur traîné dans la boue par les manifestants en se séparant dans son gouvernement pour rallier à sa cause les nombreux Burkinabè qui, par dépit, ont fini par lui souhaiter son départ. Et c’est le moment de le faire car après cela, il sera sûrement trop tard. Et pour une bonne raison. La crise sécuritaire, si elle n’est pas atténuée, s’accompagnera d’une crise alimentaire avec la saison agricole catastrophique. Et là, nul besoin d’avoir le troisième œil du sorcier pour lire les conséquences, puisqu’il est évident, comme disent les Anglais, qu’« un homme qui a faim est un homme en colère ». Cela dit, les réprimandes contre PREKA, comme l’appellent ses fans, ne doivent pas faire oublier aux Burkinabè que la dégradation interne de la situation politique risque de nous faire tomber dans le piège des terroristes dont la stratégie vise à affaiblir l’Etat qui s’effondre de l’intérieur pour donner vous la liberté de venir vous régaler de son cadavre. En effet, il faut toujours garder à l’esprit que c’est lorsque le mur présente des fissures que les cafards et autres vipères peuvent s’y développer. Il est donc plus qu’urgent de maintenir la cohésion sociale afin de présenter un front uni à l’ennemi. Mais même ici, c’est au chef de l’État de donner le ton pour l’avenir. Nul doute que les jours à venir nous diront si l’homme a compris le message de son peuple qui, en ces temps difficiles, a les yeux rivés sur lui, comme le peuple israélien qui, dans la Bible, a levé les yeux. le serpent de bronze pour espérer guérir des morsures brûlantes des serpents du désert. Et cette langue de la Bible, Roch Marc Christian Kaboré, considéré comme un homme de foi, devrait bien la comprendre.
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