Lors de son intervention devant l’Assemblée législative de transition (ALT) pour le traditionnel discours sur l’état de la nation, le Premier ministre de la transition, Me Apollinaire Kyélèm de Tambèla, a laissé entendre qu’il était raisonnablement difficile d’aller aux élections sans le retour de la sécurité. Ce faisant, le chef du gouvernement a emboîté le pas à un certain nombre de personnalités et d’organisations de la société civile qui, par divers canaux, avaient clairement exprimé leur position sur la question, estimant que les élections n’étaient pas une priorité dans le contexte sécuritaire actuel du Burkina Faso. Pour ne citer qu’un exemple, l’ancien président de l’Assemblée nationale et diplomate, Mélégué Traoré, a déclaré : « Il faut arrêter cette confusion et ces fantasmes. Il y a beaucoup de faux problèmes autour des élections. Aujourd’hui, l’essentiel pour le Burkina Faso n’est pas l’organisation des élections, mais la libération du pays. On organise des élections quand l’État existe. Pour moi, ce n’est pas la priorité. La démocratie n’est pas sa raison d’être, sa légitimité. Et, il faut le dire, ce serait faire preuve de mauvaise foi que de demander, dans l’état actuel de la situation nationale, que l’on prépare une compétition électorale dont serait exclue une grande partie de l’électorat, qui n’y penserait même pas. Ce serait même faire le jeu des forces obscurantistes qui tentent de démembrer le Burkina, que d’organiser des élections en excluant des zones du pays inaccessibles pour cause d’insécurité. Mais dans un Burkina qui semble avoir perdu son Nord, au sens propre comme au sens figuré, le bon sens est-il la chose la mieux partagée ?
La seule alternative est la reconquête du territoire national.
C’est particulièrement vrai dans certains milieux, notamment en politique, où l’on est avide de retrouver son poste. En effet, il n’est un secret pour personne qu’au Burkina Faso, comme ailleurs en Afrique, le pouvoir est un tremplin vers la richesse, et il est facile d’imaginer que les partis politiques dont le programme a été arraché n’ont pas la même vision des choses que ceux qui pensent que « ce n’est pas par les élections qu’on libérera le pays ». Et la vérité est qu’ils ne manqueront pas d’arguments pour défendre leur position devant la communauté internationale qui a fait de la démocratie l’horizon indépassable de l’humanité en matière d’organisation politique. Parmi ces arguments, il y aura sans doute celui selon lequel les militaires ne veulent pas quitter le pouvoir et tentent de gagner du temps pour préparer une élection afin de se succéder à eux-mêmes. En tout état de cause, il appartient aux autorités de transition actuelles de ne pas travailler à jeter de l’huile sur le feu de ceux qui les accusent de travailler à ne pas quitter le pouvoir. Cela dit, la seule alternative pour séparer les deux camps est la reconquête réussie du territoire national. C’est la raison principale pour laquelle le Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration (MPSR I et MPSR II) a pris le pouvoir, et c’est donc la base de la relation entre les autorités de transition et le peuple burkinabé. Tant que la marche victorieuse du peuple contre les groupes armés qui ont juré de détruire le Burkina Faso se poursuivra au rythme actuel, il sera difficile pour le peuple de céder aux sirènes des politiciens dont la gestion chaotique du pays est à l’origine des souffrances indicibles que vit le peuple aujourd’hui.
Sidzabda