La Côte d’Ivoire est un pays extraordinaire. Ceux qui avaient prophétisé que ce pays étonnerait le monde ne pensaient pas si bien ; tout comme ceux qui prétendaient que la Côte d’Ivoire est le pays de tous les possibles.
Côte d’Ivoire : le prix de l’impunité
Pour les partisans objectifs du parti gouvernemental, qui inondent les réseaux sociaux d’images, ponts, carrefours, routes goudronnées et bien d’autres infrastructures construites ou en construction, « la prophétie » s’est réalisée ou se réalise chaque jour. Ils ne font pas non plus d’économies en publiant les statistiques des structures financières internationales, qui font de la Côte d’Ivoire le pays le plus riche de la CEDEAO ou le plus puissant de l’UEMOA.
Si l’on peut admettre que le pays progresse, il n’en reste pas moins que le revers de la médaille est moins rose. Paupérisation, augmentation inexpliquée de certains services et donc cherté de la vie, sont le lot quotidien des Ivoiriens. Le murmure actuel des Ivoiriens contre Orange, Mtn et Moov, les entreprises de télécommunications, et contre l’Artci, le régulateur du secteur des télécommunications, en est une parfaite illustration. En cause, l’augmentation du prix des données opérées par lesdites sociétés, aidées en cela par l’Artci, qui devrait protéger le consommateur ivoirien.
Pour une fois, les Ivoiriens de toutes confessions religieuses, de toutes tendances politiques et de toutes classes sociales sont unanimes pour dénoncer cet abus d’Orange, Mtn et Moov, et s’indignent de « l’abandon fugitif » de l’Artci, et donc de l’Etat ivoirien. On s’interrogeait encore sur l’issue de ce bras de fer entre le « cartel » des télécommunications Artci et les consommateurs ivoiriens, quand l’actualité s’est mise à bourdonner avec une rumeur de détournement (encore) à l’Artci.
La récurrence des rumeurs de détournements de fonds, semble ne pas bouger au plus haut niveau de l’Etat
La précédente, qui concernait 500 millions et qui avait entraîné la suspension par le directeur général de certains agents, n’a pour l’instant pas eu son épilogue. Et le peuple ivoirien ne connaît ni les détails ni les inconvénients de cette épineuse affaire. Nous venons de ce fait au désespoir des dirigeants passés ou actuels de cette entreprise d’Etat. Artci semble être affecté par « une malédiction ». Mais la récurrence des rumeurs de malversations dans cette entreprise ne semble pas émouvoir le plus haut sommet de l’Etat.
L’ancien PDG de cette société, licencié à la suite d’un audit qui a bloqué sa direction, se la coule douce sans soucis. Bien sûr l’enquête continue… Mais une question taraude l’âme de plusieurs Ivoiriens : comment un président du conseil d’administration d’une entreprise dont le directeur général a été limogé après un audit peut-il encore se retrouver président du conseil d’administration d’une autre entreprise où cette rumeur de détournement se fait entendre encore et encore sans que ça bouge ?
Doit-on vraiment s’étonner de cet état de fait ? Certainement pas. Il y a quelque temps, les directeurs généraux de certaines entreprises publiques et parapubliques ont été licenciés à la suite d’audits qui ont révélé des détournements de fonds et autres détournements ou mauvaise administration. Ceux-ci, comme toute sanction, ont été démis de leurs fonctions, rien de plus, à l’exception de l’un d’eux, qui savoure désormais les délices du monde carcéral.
La saga continue…
Les autres qui se sont aussi enrichis aux dépens du contribuable ivoirien jouissent en paix de leurs fortunes amassées. Ce mode de gouvernement, fait d’impunité, ne peut qu’encourager ceux qui ont la possibilité de se remplir les poches, sans que le ciel ne leur tombe sur la tête, et en cas de destitution, sans que personne ne leur demande de se rendre. On comprend donc que les cas de détournements de fonds soient légion depuis 2011.
Hier des dizaines de milliards ont disparu au Sportello Unico, des centaines de milliards au Cafè-Fondo Cacao, des tonnes de gaz se sont évaporées au Gestoci et… la saga continue. Où sont passées la rigueur et la technicité chantées à longueur de journée et qui caractériseraient ceux qui sont responsables de notre destin ? Ainsi va le pays. Mais s’il y a eu un matin en Eburnia, il y aura sûrement un soir et l’ivraie sera séparée du vrai.