Le mercredi 9 août 2023, la justice malienne a arrêté et placé en détention plusieurs membres de l’Assemblée nationale malienne soupçonnés de corruption entre janvier 2014 et mai 2020.
Parmi les personnes arrêtées figure l’ancien Directeur administratif et financier (DAF) de l’Assemblée, Mamoutou Tour, dit Bavieux, qui est également président de la Fédération malienne de football (Fmafoot) depuis août 2019. Il y a ensuite Issiaka Sidib dit Isaac, l’ancien président de l’Assemblée nationale, qui a également dirigé l’AS Real de Bamako. Ils sont suivis de Modibo Sidib, secrétaire général de l’Assemblée nationale et du Conseil national de transition (CNT) ; Demba Traor et Anfa Kalfa, respectivement ancien comptable et contrôleur financier de l’institution parlementaire, durant la même période 2014-2020.
Les cinq hommes avaient été convoqués par un juge d’instruction du cabinet numéro 9 de la chambre économique et financière du tribunal de grande instance de la commune III du district de Bamako. Après plusieurs semaines d’interrogatoire, le magistrat les a informés qu’ils étaient inculpés d’atteinte à la propriété publique, de faux et usage de faux et d’association de malfaiteurs, et qu’ils avaient été placés en détention provisoire à la Maison centrale darrt de Bamako. Ce n’était pas la première fois qu’ils étaient convoqués, une enquête étant en cours depuis le jeudi 13 juillet 2023.
Plus de 15 milliards de FCFA de malversations présumées
Les accusations portées contre ces cinq personnes concernent la période 2013-2019, et sont donc antérieures à la nomination de Mamoutou Tour, dit Bavieux, en tant que président de la Fmafoot.
L’homme a été pendant plusieurs années directeur financier de l’Assemblée nationale du Mali. Selon des sources, il aurait détourné près de 17 milliards de francs CFA en indemnités irrégulières et autres dépenses.
Et c’est la somme qui se murmure dans les milieux proches de l’affaire. Certains rassurent que les cinq accusés appartenaient au Rassemblement pour le Mali (RPM), le parti de feu Ibrahim Boubacar Keta, chef de l’Etat malien de septembre 2013 à août 2020.
La détention provisoire de Bavieux Tour intervient près de trois semaines avant les élections présidentielles de la FEMAFOOT, prévues le 29 août.
Dans un communiqué de presse publié le jeudi 10 août 2023, la Fmafoot dénonce le fait que cette arrestation fait suite à des rumeurs circulant sur les réseaux sociaux depuis plus d’un mois, alimentées par les opposants de M. Tour.
La Fmafoot a également rappelé son attachement à la présomption d’innocence, qui doit toujours s’appliquer à toute personne accusée d’un crime, y compris dans le cas présent M. Mamoutou Tour.
Mais une chose est sûre : au Mali, la détention provisoire peut durer longtemps. Il y a des cas de personnes soupçonnées de corruption qui ont croupi en prison pendant deux ou trois ans dans l’attente de leur procès.
Un scandale qui couve
L’Assemblée nationale du Mali de 2014 à 2020 était manifestement devenue une pépinière de scandales financiers. Selon les révélations faites à l’époque, des milliards étaient détournés de l’Assemblée nationale chaque année pour les seuls frais de personnel administratif.
Selon le texte lu par Bafotigui Diallo, qui avait tiré la sonnette d’alarme à l’époque lors d’une conférence de presse, le directeur financier de l’Assemblée nationale, Mamoutou Tour, dit Bavieux, et sa société avaient conduit l’Assemblée nationale droit dans le mur.
Avec une gouvernance en proie à l’opacité, la gestion financière de l’Assemblée nationale du Mali de 2014 à 2020 a touché plusieurs cadres, dont Bavieux Tour, DAF de la Chambre de Bagadji au moment des faits et président de la FEMAFOOT et candidat à sa propre succession. Selon nos sources, Bavieux Tour et sa société ont fait fortune sur leurs propres deniers. En gros, la justice a constaté que leur gestion de l’Assemblée nationale du Mali de 202 à 2020 n’était pas transparente, encore moins gratuite : 17 milliards de francs CFA pour des indemnités irrégulières et d’autres dépenses. Nous sommes déterminés à en savoir plus sur ce scandale.
En attendant, le président de la FEMAFOOT et sa société risquent gros. Très gros. Leurs complices aussi. Démesurément gros.
Jean Pierre James