Le Burkina Faso et le Mali aux côtés du Niger face à la menace militaire
Le Burkina Faso et le Mali, sous commandement militaire, ont mis en garde lundi contre toute intervention militaire au Niger visant à rétablir Mohamed Bazoum, le président renversé par un putsch.

Manifestation pro-junte à Niamey le 30 juillet 2023.
AFP
Cette mise en garde intervient un jour après que les dirigeants ouest-africains, soutenus par leurs partenaires occidentaux, ont menacé de recourir à la « force ». La France, ancienne puissance coloniale dans la région, a notamment accusé les militaires qui ont pris le pouvoir au Niger de vouloir « intervenir militairement ».
Dans une déclaration commune, les gouvernements du Burkina Faso et du Mali « préviennent que toute intervention militaire contre le Niger sera considérée comme une déclaration de guerre contre le Burkina Faso et le Mali ». Ils « préviennent que toute intervention militaire contre le Niger entraînerait le retrait du Burkina Faso et du Mali de la CEDEAO (Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest), ainsi que l’adoption de mesures d’autodéfense en faveur des forces armées et du peuple nigériens ». Ils ajoutent qu’ils « refusent d’appliquer » les « sanctions illégales, illégitimes et inhumaines contre le peuple et les autorités du Niger » décidées à Abuja.
Dimanche, les dirigeants de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) ont donné à la junte militaire du Niger un ultimatum d’une semaine pour un « retour complet à l’ordre constitutionnel », déclarant qu’ils n’excluaient pas « l’usage de la force » si cela ne se produisait pas. Ils ont également décidé de « suspendre toutes les transactions commerciales et financières » entre leurs États membres et le Niger, et de geler les avoirs des responsables militaires impliqués dans le coup d’État.
Pression
Dans un communiqué séparé, la Guinée, dont le gouvernement est également issu d’un coup d’État, « exprime son désaccord avec les sanctions préconisées par la CEDEAO, y compris l’intervention militaire » et « a décidé de ne pas appliquer ces sanctions qu’elle considère comme illégitimes et inhumaines ». Conakry « demande instamment à la CEDEAO de reconsidérer sa position ».
Les pressions sur les auteurs du coup d’Etat du 26 juillet pour qu’ils rétablissent rapidement « l’ordre constitutionnel » s’accentuent de la part de tous les partenaires occidentaux et africains du Niger, pays considéré comme essentiel dans la lutte contre les groupes djihadistes qui dévastent depuis des années une partie du Sahel. La France et les Etats-Unis, notamment, déploient respectivement 1.500 et 1.100 soldats pour aider à la lutte contre les djihadistes.
Accusations contre Paris
La France, soutien indéfectible du président Bazoum, semble être la principale cible des militaires qui l’ont renversé. Lundi, ils l’ont accusée de vouloir « intervenir militairement », ce que dément la chef de la diplomatie française, Catherine Colonna : « Ce n’est pas vrai », a-t-elle déclaré à BFMTV. « Il faut démonter les mensonges et ne pas tomber dans le panneau », a-t-elle également déclaré à propos des slogans anti-français qui ont fleuri lors d’une manifestation devant l’ambassade de France à Niamey dimanche. Des milliers de manifestants pro-putsch militaire ont tenté de pénétrer dans l’ambassade, mais ont été dispersés par des gaz lacrymogènes.
Les putschistes nigériens ont déclaré que les tirs de gaz lacrymogènes avaient fait « six blessés, qui sont soignés dans les hôpitaux » de la capitale.
Dans une déclaration commune, les ministères français des Affaires étrangères et de la Défense ont nié toute utilisation de « moyens létaux », en réponse à certains responsables nigériens qui avaient déclaré à la presse que la France avait tiré à balles réelles sur les manifestants.
Le président français Emmanuel Macron a menacé dimanche de réagir « immédiatement et de manière intraitable » à toute attaque contre les citoyens et les intérêts français au Niger. La France a salué « les décisions prises par les chefs d’Etat » de la CEDEAO réunis à Abuja, une réunion à laquelle a également participé le dirigeant tchadien Mahamat Idriss Déby Itno, dont le pays n’est pas membre de l’organisation ouest-africaine.
« Arrestations abusives
Il s’est ensuite rendu à Niamey, où il s’est entretenu avec Mohamed Bazoum, détenu à la résidence présidentielle depuis le 26 juillet, et le général Abdourahamane Tiani, chef de la junte.
L’Union européenne (UE) a prévenu qu’elle tiendrait les putschistes pour responsables de « toute attaque contre des civils, du personnel diplomatique ou des installations » et qu’elle « soutiendrait rapidement et résolument » les décisions de la CEDEAO. L’Allemagne et l’Espagne ont annoncé la suspension de l’aide au Niger.
De son côté, la Russie, dont le drapeau a été hissé par des manifestants pro-junte à Niamey, demande que « la légalité soit rétablie dans le pays le plus rapidement possible » et qu’il y ait « de la retenue ».
Le Parti nigérien pour la démocratie et le socialisme (PNDS, au pouvoir) a dénoncé les « arrestations abusives » de quatre ministres – Intérieur, Pétrole, Mines et Transports -, d’un ancien ministre et du chef du parti, dans un communiqué transmis lundi à l’AFP. Des sources proches de la présidence ont également fait état de l’arrestation du ministre de l’Enseignement supérieur.
Le Niger est l’un des pays les plus pauvres du monde, malgré ses ressources en uranium. En proie à des attaques de groupes liés à l’État islamique et à Al-Qaïda, il est le troisième pays de la région à subir un coup d’État depuis 2020, après le Mali et le Burkina Faso.
AFP
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