Le mal est enfin identifié avec l’arrivée du nouveau ministre. A l’occasion de sa nomination à la tête du Département de l’Industrie et du Commerce le vendredi 14 juillet, Moussa Alassane Diallo a mis en garde les commerçants et négociants maliens sur l’urgence de trouver 100 000 tonnes de sucre pour éviter une pénurie sur le marché. Visiblement déterminé à assainir le secteur, il s’est finalement rendu compte que la gestion de l’usine N-Sukala-SA, censée fournir aux Maliens leurs besoins en sucre, était opaque et insupportable.
Le mois dernier, après une visite au COMATEX, le ministre Diallo et sa délégation ont visité Sukala et N-Sukala-SA, deux usines sucrières du Haut-Kala. N-Sukala-SA est le fruit de la coopération Mali-Chine. Les actionnaires de l’usine sont le gouvernement du Mali et la China Light Industrial Corporation for Foreign Economic and Technical Cooperation (CLECTC). Après une visite suivie d’une rencontre avec le personnel, le nouveau ministre s’est insurgé contre la gestion exécrable de l’usine. Selon Moussa Alassane, l’usine est gérée depuis longtemps en violation totale des lois du pays. Il est impératif que l’entreprise change de gouvernance », déclare le chef du département de l’industrie et du commerce. Les pertes cumulées de l’entreprise s’élèvent à 35 milliards de francs suisses », a-t-il ajouté sur la page Facebook du département. Quant aux préoccupations, nous regrettons qu’elles restent nombreuses et variées. Pire, NSukala ne paie pas ses dettes fiscales, n’a pas de dividendes et pas de comptabilité analytique. Pas de manuel de procédures. Bref, lit-on sur la même page, les résultats de l’usine sont négatifs. Selon la même source, l’entreprise organise son insolvabilité pour ne pas payer ses dettes. En colère, le ministre Diallo l’a avoué dans une vidéo qui a largement circulé sur le web : Aujourd’hui, si vous regardez l’état des affaires et des finances du Mali, NSukala ne paie pas le prêt de 46 milliards de francs suisses que lui doit l’Etat du Mali. La société ne s’acquitte pas correctement de sa dette fiscale. Elle ne verse pas de dividendes à l’Etat du Mali. La société ne respecte pas la réglementation et la législation du travail en vigueur en République du Mali. Elle ne paie pas de redevances et n’a pas de procédure administrative financière à jour pour assurer la double signature des comptes par un Malien et un Chinois. Mais ce n’est pas tout. La société ne tient même pas de comptabilité analytique, ce qui permettrait de contrôler la production. Le ministre Diallo déplore le manque de transparence dans la gestion de la société sucrière du pays dû à ces différents agissements. La transparence dans la gestion n’est pas garantie, NSukala. Les transactions et les normes comptables ne sont pas transparentes. Il y a maintenant une rupture de confiance entre NSukala et le ministre de l’industrie et du commerce », a-t-il souligné. Selon lui, des mesures doivent être prises pour que l’entreprise reparte sur de nouvelles bases. Le statu quo n’est pas une option. Il ne peut pas continuer. Ce n’est pas possible », déclare le dirigeant en colère. À ces problèmes s’ajoute celui du développement économique, en particulier le programme de mise en valeur des terres pour augmenter le niveau de production de canne à sucre et de sucre à l’usine », souligne le directeur. L’entreprise n’a pas de programme industriel à court, moyen ou long terme. Il déplore encore que l’entreprise ne soit ni économiquement ni financièrement viable. Parce que le fonds de roulement est négatif, les fonds propres de N-Sukala sont négatifs, la trésorerie est négative, le résultat net est négatif et les règles de gestion ne sont pas respectées », explique le patron en colère. Aujourd’hui, poursuit-il, le Mali ne gagne rien de NSukala. Et cela ne peut plus durer. Voilà les raisons pour lesquelles le Mali continue à avoir des problèmes d’approvisionnement en sucre. Il est temps de se poser des questions. Nous, dit Moussa Alassane Diallo, nous sommes des ministres complexes. Nous allons soulever ces questions et prendre les décisions qui s’imposent.
Mamadou Diarra
Source : LE PAYS