Dans un message daté du 7 mai 2023, le coordonnateur général de l’Appel du 20 février 2023 pour sauver le Mali, Cheick Mohamed Chrif Kon, a déclaré que pour sauver le Mali qui est à la croisée des chemins et qui n’est pas confronté à un problème constitutionnel, la seule alternative est de tourner la page de cette Transition en rupture avec les principes de l’État de droit et les valeurs républicaines.
Dans son message, Cheick Mohamed Chrif Kon a rappelé à ses militants qu’ils sont unis autour des mêmes idéaux, toujours plus nombreux à défendre les principes démocratiques et les valeurs républicaines auxquels le peuple souverain du Mali a souscrit en toute responsabilité. Pour lui, ces principes démocratiques et ces valeurs républicaines sont aujourd’hui menacés.
Il est vrai que nous nous trouvons dans un contexte caractérisé par l’instrumentalisation consommée de la justice et l’assujettissement de la plus haute juridiction de l’ordre administratif du pays par les autorités de transition, au nom du concept flou de raison d’Etat. Cependant, cette situation malheureuse que nous déplorons tous, loin de nous influencer négativement, devrait au contraire stimuler notre ardeur à faire de notre pays l’Etat de droit et de justice véritablement démocratique auquel notre peuple aspire profondément. Avec le temps, et le temps étant le meilleur juge, il n’est pas impossible que toutes ces mauvaises décisions judiciaires, qui ont délibérément violé les droits des citoyens, voire des personnes au nom desquelles la justice est rendue, soient remises en question. C’est aussi le lieu d’inviter constamment les gens à garder l’espoir, à rester optimistes et à espérer, a-t-il ajouté.
Il a ajouté que le vendredi 5 mai 2023, le porte-parole du gouvernement de la Transition a lu le décret n° 2023-0276/PT-RM du 5 mai 2023 portant convocation de la circonscription, dans une déclaration diffusée sur la chaîne de télévision nationale, Ceci en violation du cadre légal et des conditions exigées par la Constitution en vigueur, que le Président de la Transition, initiateur du projet, avait solennellement signée.
Selon Cheick Mohamed Chrif Kon, la Charte de la Transition, qui organise et régit la Transition et que le Président de la Transition s’est engagé à faire respecter devant les juridictions de son pays, ne lui donne aucun mandat pour modifier par la force la Constitution actuelle et encore moins pour doter le pays d’une nouvelle Constitution.
Les Conférences Nationales de Refondation, qui ne sont juridiquement que des actes de fait, reflétant la volonté de la Transition et de ses seuls partisans, ne sauraient prévaloir sur la Charte de la Transition, a fortiori, être considérées comme supérieures à une Constitution dûment adoptée par référendum par le peuple souverain, à l’issue de véritables consensus, de débats réellement démocratiques et inclusifs. Après avoir exprimé notre désaccord avec l’ensemble du processus, manifestement illégal, il est clair que nous nous attaquerons à l’acte réglementaire imposant ce référendum, également irrégulier, comme l’indiquent nos premières réactions le 5 mai 2023, à la lecture du décret susmentionné. Le même jour, un communiqué attribué à la commission CADO, saluant ce décret comme une volonté de retour des autorités de transition à l’ordre constitutionnel, a fait son apparition sur les réseaux sociaux avant d’être timidement lu au journal télévisé du soir de la chaîne nationale. En tout état de cause, le Mali étant un Etat de droit et l’option démocratique étant irréversible, ce communiqué, dont l’authenticité reste à vérifier, n’a aucune incidence sur notre détermination à poursuivre nos objectifs clairement définis, qui sont très nobles et légitimes. Comme cela a été suffisamment développé et démontré, il ne fait aucun doute pour tout démocrate que l’organisation de ce référendum illégal dans une situation de cacophonie et de tension, dans un contexte qui ne s’y prête pas, relève de la violence excessive. En plus de compliquer davantage la situation de crise multidimensionnelle que nous connaissons, il est clair que ce référendum conduira à la division du Mali, remettant en cause l’unité nationale. Outre l’indisponibilité des cartes d’électeurs biométriques pour la moitié des citoyens légalement inscrits, et la non installation des membres de l’Autorité Indépendante de Gestion des Élections sur une grande partie du territoire national, plus des deux tiers de ce territoire sont encore sous le contrôle du pouvoir central de Bamako, entre autres. Un simple survol de notre droit positif suffit à convaincre que, outre le manque de qualité de l’initiateur du projet de la nouvelle constitution, les conditions n’étaient pas réunies pour qu’un référendum régulier soit organisé en vue de son adoption. Par ailleurs, nul n’étant au-dessus de la loi, tout acharnement de la part des auteurs et des commanditaires de ce projet et de ce référendum devrait nous amener à engager leur responsabilité pénale pour coalition de fonctionnaires contre la Constitution et les lois de la République, a-t-il souligné.
Pour lui, l’article 118 de la Constitution actuelle et l’article 78 du Code pénal sont très différents. L’article 118 de la Constitution stipule que l’initiative de la révision de la Constitution appartient simultanément au Président de la République et aux députés. Le projet ou la proposition de révision doit être voté par l’Assemblée nationale à la majorité des deux tiers de ses membres. La révision n’est définitive que lorsqu’elle est approuvée par référendum. Aucune procédure de révision ne peut être engagée ou poursuivie s’il est porté atteinte à l’intégrité du territoire. La forme républicaine et l’égalité de l’État, ainsi que le multipartisme, ne peuvent être révisés.
Il a rappelé que l’article 78 du Code pénal stipule que tous les fonctionnaires de n’importe quelle partie de l’autorité, par procuration ou par correspondance entre eux, qui ont pris des mesures contraires à la Constitution et aux lois, seront punis d’une peine d’emprisonnement de cinq à vingt ans. En outre, ils seront interdits d’exercer une fonction publique ou toute autre fonction publique pendant une période pouvant aller jusqu’à dix ans.
L’approbation forcée de la révision constitutionnelle incitera le peuple à la désobéissance civile pour préserver la forme républicaine de l’État.
Selon le Coordonnateur général de l’Appel du 20 février 2023 pour sauver le Mali, bien que le recours à la force ne soit envisagé dans aucun Etat membre de la CDao comme méthode de révision constitutionnelle, il ne faudrait pas encourager les autorités de transition à s’engager dans une telle voie qui aurait des conséquences très graves, voire catastrophiques, pour le pays.
Cela reviendrait à inciter le peuple à la désobéissance civile pour préserver la forme républicaine de l’Etat, d’ailleurs remise en cause dans le projet sur mesure controversé du pays. Nous attendons donc que le décret convoquant le collège électoral pour le référendum soit disponible, afin de pouvoir exercer notre recours en annulation dans les meilleurs délais, pour excès de pouvoir pour divers motifs, tous fondés, a-t-il averti.
Pour lui, le projet de constitution, qui est source de graves difficultés, alors qu’il continue de diviser, est antinomique des valeurs républicaines d’égalité des citoyens. Il organise l’impunité de certaines personnalités identifiables responsables du crime de confiscation et du crime encore plus grave de coup d’Etat et de putsch, après que ce dernier ait été considéré dans le même projet comme imprescriptible en tant que crime contre le peuple malien, a-t-il soutenu.
L’indépendance du pouvoir judiciaire est sérieusement remise en cause par l’instrumentalisation du pouvoir judiciaire ou sa subordination au pouvoir politique et militaire.
Incongrûment, il dit que c’est l’indépendance de la justice qui est gravement remise en cause au moment même où le peuple ne cesse de dénoncer l’instrumentalisation de la justice ou sa subordination au pouvoir politique et militaire. Au lieu de remédier à cette situation, les autorités de transition ont choisi de la légitimer à travers leur future Constitution controversée, qu’elles entendent imposer par un référendum qui n’en est pas un. Contre toute attente, en violation des principes universels et de tous les instruments internationaux sur l’indépendance de la justice qui s’imposent au Mali, les auteurs et promoteurs de ce fameux projet entendent pouvoir soustraire le procureur à l’autorité de la loi dans l’exercice de ses fonctions, pour le placer désormais sous l’autorité du pouvoir politique ou des autorités militaires. Un tel recul, qui compromet dangereusement les droits et libertés fondamentaux du citoyen, que le pouvoir judiciaire est chargé de faire respecter, ne devrait laisser indifférent aucun magistrat ni même aucun citoyen, a-t-il déclaré.
Selon Cheick Mohamed Chrif Kon, le dernier problème est que la recherche du consensus et de l’inclusivité n’a jamais été une préoccupation des responsables du projet de Constitution et du projet de référendum. Puisqu’une seule pensée a prévalu, tous ces processus n’ont été que l’affaire des transitionnistes et de leurs partisans. Malgré les appels pressants au consensus comme règle de toute Transition, tous les citoyens ciblés pour leur adhésion aux principes démocratiques et aux valeurs républicaines, y compris les structures et personnalités membres de notre plateforme, ont été qualifiés d’expatriés ou d’ennemis de la nation, voire au service d’autres puissances étrangères. Sans autre forme de procès, ils ont été purement et simplement exclus du débat et de toute consultation. Maintenant que le moment est venu, comme annoncé à plusieurs reprises, d’imposer à nos gouvernants les principes de la démocratie et de l’État de droit, qui exigent le respect de l’égalité entre tous, nous devons redoubler de vigilance, nous armer de la force et du courage nécessaires, et disposer de l’intelligence indispensable, pour mettre fin à toutes ces manipulations permanentes qui tendent à surprendre la bonne foi des uns et des autres. Loin de nous laisser divertir ou distraire par les contre-arguments de certains organes de presse voués à la propagande mensongère au service du gouvernement de transition, nous devons prendre conscience de notre force en tant que composante largement représentative de la nation, a-t-il dit à ses partisans.
Pour sauver le Mali qui est à la croisée des chemins et qui n’est pas confronté à un problème constitutionnel, la seule alternative est de tourner la page de cette transition qui n’est pas en phase avec les principes de l’Etat de droit et les valeurs républicaines.
De l’avis de Cheick Mohamed Chrif Kon, pour sauver le Mali qui est à la croisée des chemins et qui n’est pas confronté à un problème constitutionnel, la seule alternative est de tourner la page de cette transition en déroute, à la fois par rapport aux principes de l’Etat de droit et aux valeurs républicaines.
Cela passe par un retour rapide à l’ordre constitutionnel à travers des élections largement participatives et inclusives, libres, transparentes et crédibles. C’est en patriotes, en démocrates et républicains convaincus, conscients des réalités internationales et ouverts au reste du monde moderne, que nous avons pris sur nous de nous désolidariser, sans hésitation, de ce projet néfaste, illégal et déstabilisateur. Le référendum irrégulier convoqué pour imposer son adoption par la force, par la peur et l’intimidation, est contraire au mécanisme prévu par la Constitution actuelle. Bien que son promoteur ne soit pas qualifié pour le faire, son organisation porte atteinte à l’unité nationale en consacrant la division du pays. En raison de la manière dont nous avons réussi à faire admettre à une grande partie de la population l’importance de l’abandon de ce projet illégal de nouvelle Constitution, nous utiliserons sans aucun doute les moyens légaux pour empêcher la tenue de ce référendum spécial en vue de son adoption. C’est en restant plus déterminés dans notre choix de sauver le Mali que nous imposerons le respect du droit aux autorités de transition qui n’ont pas reçu mandat de nous plonger dans l’inconnu, ni même de nous soumettre aux règles de l’état de non-droit, a-t-il déclaré.
Siaka Doumbia
20 février 2023