LUXEMBOURG/BAMAKO Proche de la Russie et laissant la voie libre au groupe Wagner, la junte militaire malienne se méfie de la communauté internationale, ce qui pourrait conduire à un retrait progressif du Luxembourg tant sur le plan militaire qu’humanitaire.
Les soldats luxembourgeois vont-ils quitter le Mali ? Cette éventualité est désormais envisagée alors que la situation sécuritaire se dégrade dans ce pays pauvre du Sahel, meurtri par les offensives djihadistes depuis des décennies et deux coups d’État en moins de trois ans.
Dans une réponse parlementaire au député Gusty Graas, le ministre des Affaires étrangères Jean Asselborn n’a pas annoncé le retour des 23 hommes déployés dans l’EUTM (European Union Training Mission in Mali) de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA), mais a exprimé ses craintes quant à l’avenir de cette dernière : Elle a un rôle crucial à jouer dans la mise en œuvre des accords de paix et son retrait aura des conséquences négatives sur ce processus. Pour éviter cela, la pleine coopération des autorités maliennes et la levée des obstacles à la mission sont nécessaires.
Un vœu pieux, compte tenu des signaux envoyés par l’actuelle junte militaire au pouvoir. Après la fin de l’opération française Barkhane, soutenue par le Luxembourg, les autorités maliennes ont récemment interdit les activités des ONG françaises, dans un contexte de méfiance à l’égard de Paris et de liens dangereux avec la Russie.
L’omniprésence de Wagner et de la Russie
En janvier, le régime menacé par les milices armées a reçu du matériel militaire de Moscou. Quant au groupe paramilitaire Wagner, il gagne du terrain au Mali, malgré les accusations d’exactions contre la population civile. Cette proximité est directement combattue par le chef de la diplomatie luxembourgeoise, qui s’inquiète de la tournure des événements.
Les autorités militaires maliennes ont récemment demandé au directeur de la division des droits de l’homme de la MINUS de quitter le pays. Le même sort a été réservé au représentant du Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme. Les fonctionnaires en contact avec le Luxembourg et en poste au Mali ne sont pas soumis à de telles restrictions pour le moment, a indiqué Jean Asselborn, mais la présence des représentants luxembourgeois dans le pays semble plus fragile que jamais.
Les besoins de la population ne font qu’augmenter
Jean Asselborn
Ces changements stratégiques ont déjà eu des conséquences au niveau humanitaire. Ainsi, le ministre a décidé d’adapter ses méthodes de mise en œuvre dans le domaine de la coopération au développement, et la signature du prochain PIC (Programme Indicatif de Coopération) a été reportée, alors que les besoins des populations ne font qu’augmenter, a-t-il reconnu.
Lors d’une réunion informelle des ministres de la Défense à Stockholm, en Suède, mardi et mercredi, Franois Bausch a également exprimé le soutien du Luxembourg à la MINUS, notamment face à la désinformation malveillante à laquelle elle est confrontée, alors que le mandat doit être renouvelé en juin 2023. Compte tenu de l’hostilité de la junte au pouvoir, son efficacité n’est pas garantie.