Qui dirigera le Mali au terme de cette transition, après toutes les réformes qui ont imposé une telle résilience aux Maliens ? Chacun d’entre eux a sans doute son propre profil. L’autre est un leader qui a le souci du pays et dont la vision pour le Mali l’étreint comme un rêve dont la réalisation conditionne toute son existence.
Vous l’aurez compris, le Mali post-transition a besoin d’un homme de la trempe de feu Modibo Kita, Président du gouvernement malien de 1960 à 1968 et leader du parti Union Soudanaise/Rassemblement Démocratique Africain (US-RDA). En lisant les témoignages du premier président du Mali indépendant, on se rend compte de la chance que nous avons eue et, surtout, du destin exceptionnel qui a été le sien.
Modibo Keita semblait destiné à faire partie du leadership spirituel de l’Afrique. Et la jeune génération plaçait en lui ses plus grands espoirs, affirment les écrivains Mongo Beti et Odile Tobner (Dictionnaire de l’Ingritude). Considéré comme l’un des plus grands leaders du tiers-monde, le premier président du Mali jouissait d’une notoriété qui dépassait les frontières de son pays et du continent africain. Andr Blanchet, dans un reportage pour la télévision française (ORTF), l’a décrit comme l’un des plus prestigieux dirigeants de l’Afrique indépendante. Quant au journaliste, historien et biographe Jean Lacouture, il voyait en Modibo Keita une statue vivante de l’Afrique.
Le caractère. L’homme en était solidement doté, selon divers témoignages. Ceux qui l’ont connu se souviennent aussi de sa pugnacité, de son intransigeance et de sa ténacité, qui trouvaient facilement leur essence dans un idéal fort et profond. Ainsi, parfois, c’est avec détermination qu’il défendait les causes auxquelles il croyait profondément. Pugnacité, persévérance, courage, sacrifice et dignité sont des mots qui caractérisent son combat politique et syndical.
D’autre part, le militant qu’il était savait faire preuve de réalisme, de pragmatisme et d’imagination créatrice pour faire triompher ses idéaux d’indépendance, de justice, de liberté et de paix, selon un site Internet qui lui est consacré. Certains lui reprochent un style autoritaire et une certaine intransigeance (qu’il manifestait aussi envers lui-même). Le tempérament et la forte personnalité de Modibo Keita ont souvent alimenté cette accusation d’autoritarisme, explique le site. Pourtant, selon un proche, l’homme ne voyait ses actions que dans un contexte collectif. Il est vrai que feu Modibo Kita avait une autorité naturelle qui découlait logiquement de sa force de conviction et de son comportement personnel qu’il voulait exemplaire.
Il n’était autoritaire qu’en apparence. Il était autoritaire lorsqu’il s’agissait d’appliquer et de faire respecter les règles, mais il aimait défier les autres et, si nécessaire, changer de position », a déclaré feu l’historien Professeur Bakary Kamian dans l’un de ses témoignages sur le Président Kita. Dans les réunions, malgré sa forte personnalité qui lui permettait d’exprimer facilement son opinion, Modibo Keita essayait d’encourager la discussion afin que toutes les opinions puissent être exprimées », a déclaré l’un de ses proches collaborateurs.
Leader charismatique à la réputation internationale, Modibo Kita a gagné prestige et respect par ses actions, ses idées et ses fortes convictions. Ceux qui ont eu le privilège de travailler avec lui disent que Modibo était un homme aux paroles nobles, un nationaliste par nature, avec de la dignité et de la distinction dans son comportement, le non-alignement comme principe et le panafricanisme dans son esprit.
En outre, il suscitait le respect et l’admiration pour le réalisme de sa vision et la clarté et la pertinence des idées qu’il exposait dans ses discours très attendus. Dans le monde, et surtout dans les jeunes pays qui ont subi la domination coloniale, rien n’est acquis, surtout si l’on choisit des voies nouvelles ; si l’on est animé d’un courage ardent, d’une volonté inébranlable ; si l’on n’accepte pas d’avance les difficultés, parfois les échecs, rappelle-t-il aux Maliens le 21 février 1964, lors de l’inauguration de la conserverie de légumes de Baguinda.
Ce conseil est plus que jamais d’actualité pour sortir notre pays du marasme dans lequel il s’est enlisé depuis plus d’une décennie !
M.B