Zana Coulibaly
Le gouvernement malien va-t-il prendre des mesures pour démasquer la machine à piller du Coordonnateur du PRRE (Projet de Reconstruction et de Relance conomique), Oumarou Camara, et du Directeur général de l’Agence d’exécution des travaux d’infrastructures et d’équipements ruraux (AGETIER), Zana Coulibaly ? En tout cas, le jeu en vaut la chandelle, précisément à partir des pratiques des responsables de ces deux structures stratégiques pour le développement rural au Mali.
Depuis l’arrivée du Coordonnateur Oumarou Camara au PRRE et du DG Zana Coulibaly à l’AGETIER, la mauvaise gestion des fonds et bien d’autres phénomènes considérés comme généralisés sont devenus monnaie courante dans ces deux structures.
Pourboires et repas au PRRE
L’audit financier de la gestion du PRRE a révélé que les opérations de dépenses liées à la gestion du projet et du Plan de Développement Intégré des Régions du Centre (PDICC) ont été entachées d’irrégularités financières pour un montant total de 749.612.155 FCFA. Ces irrégularités concernent la violation des règles d’exécution et de règlement des marchés publics et des dépenses irrégulières sur les intérêts des créanciers.
Oumarou Camara
Le Coordinateur de l’Unité de Coordination du PRRE, Oumarou Camara, a autorisé des prélèvements irréguliers sur le compte d’intégration de SOS-Sahel. En effet, l’examen des comptes bancaires de l’Unité de Coordination du Projet (UCP) et des Bureaux de Gestion Délégués (BGD), ainsi que des pièces justificatives des décaissements effectués sur le compte de SOS-Sahel, montre que le Coordinateur de l’UCP, Oumarou Camara, a autorisé l’ONG SOS-Sahel à effectuer trois (3) prélèvements irréguliers sur le compte de règlement pour préfinancer les activités de financement complémentaire du PRRE, dans l’attente de la disponibilité des fonds. Le manuel de procédure du projet ne prévoit pas un tel préfinancement et le coordonnateur n’a pas demandé l’avis de non-opposition de l’Association internationale de développement (IDA). Le montant total des trois décaissements effectués en avril, mai et juin 2019, en faveur de l’AMPA pour la publication d’annonces dans le journal LEssor, s’élève à 1 937 700 FCFA. Par ailleurs, après avoir reçu les fonds à partir du 27 août 2019, SOS-Sahel n’a pas procédé au remboursement du préfinancement.
Exacerbant la délinquance financière de l’Unité de coordination du projet de reconstruction et de relance économique, le coordonnateur Oumarou et le spécialiste en gestion financière Mahamadou Diarra ont effectué des décaissements irréguliers sur les revenus d’intérêts générés par les comptes bancaires. De l’examen de la mission d’audit du compte opérationnel de l’UCP-REP, il ressort que le Coordonnateur Oumarou Camara et le Spécialiste en gestion financière du projet, Mahamadou Diarra, ont effectué des décaissements irréguliers sur les intérêts générés par les comptes bancaires. De janvier à juillet 2022, ils ont effectué 81 décaissements sur le compte d’intérêts de l’UCP pour un montant total de plus de 132 millions de FCFA (132 135 926F), alors qu’aucune dépense sur les intérêts générés n’était prévue dans le PTBA 2022. Pourquoi cette stratégie ? Seuls le coordinateur du PRRE, Oumarou Camara, et son spécialiste en gestion financière, Mahamadou Diarra, peuvent répondre à cette question. D’autant plus qu’ils sont au centre de l’économie en ce moment.
Fraude à tous les niveaux de la banque
En ce qui concerne l’impact de la discipline budgétaire dans la gestion des conventions sur la performance d’AGETIER, avec de nombreux transferts entre conventions, l’Agence ne perçoit pas d’intérêts sur ses comptes, bien qu’elle ait négocié leur paiement avec les banques. Plus grave, des transferts et des paiements irréguliers sont reçus et versés par AGETIER à certains contractants à titre de compensation. Dans certains cas, les pièces justificatives ne sont pas fournies.
Le DG d’AGETIER, Zana Coulibaly, est clairement en position de risque du fait de son implication dans les travaux du PRRE. C’est du moins ce que révèle le rapport du commissaire aux comptes sur la gestion du PRRE qui a entraîné des irrégularités financières d’un montant de 749,6 millions de FCFA (749 612 155F) sur les périodes 2018, 2019 et 2020.
Comme l’indique le document, le directeur général d’AGETIER, Zana Coulibaly, a irrégulièrement payé le contrat de construction du pont de Kaneye. Pour s’assurer que la construction du pont de Kaneye était entièrement achevée et que la réception finale avait eu lieu, l’équipe d’audit a examiné les dossiers du contrat. Elle a également rencontré le chef de projet d’AGETIER, le spécialiste de la passation des marchés et le spécialiste de la gestion financière de l’unité de coordination du PRRE.
En conséquence, les enquêteurs ont découvert que le directeur général d’AGETIER, Zana Coulibaly, a procédé au paiement intégral du contrat n° T1-IVP2-280-03-29/2014 relatif à la construction du pont de Kaneye (ouvrage d’art) pour un montant de 24,5 millions de FCFA (24 597 500F), alors que ledit ouvrage s’était effondré pendant la période de garantie. En effet, la réception provisoire du pont de Kaneye, objet dudit marché, a eu lieu le 7 août 2018 et s’est effondré le 1er mars 2019 avant l’expiration de la période de garantie des travaux, soit environ sept (7) mois. Aussi, par lettre n007 en date du 2 mars 2019, le Maire de la Commune Rurale de Kaneye a saisi le Coordonnateur Oumarou Camara du PRRE-UCP pour l’informer de l’effondrement du pont.
A son tour, le Coordonnateur de l’Unité de Coordination dudit projet a contacté le Directeur de l’AGETIER, Zana Coulibaly, par courrier électronique en date du 5 mars 2019 pour l’informer de l’effondrement du pont à Kaneye et lui demander, par la même occasion, les mesures urgentes qu’il entend prendre pour remédier à la situation.
Auparavant, dans un courriel daté du 7 février 2019, le Coordinateur du PRRE Oumarou avait informé la Direction de l’AGETIER des plaintes formulées par les autorités communales concernant la qualité de certaines infrastructures routières réalisées sous la supervision de l’AGETIER dans la région de Tombouctou et, plus précisément, les travaux de construction de l’ouvrage de franchissement de Kaneye sur le marigot de Bourem.
En réponse à la correspondance du Coordonnateur du PRRE, l’AGETIER, dans un courriel daté du 11 février 2019 de son Directeur technique, a assuré que toutes les mesures seraient prises pour réparer les dommages survenus.
Malgré l’engagement formel pris par lAGETIER à travers son Directeur Technique, aucune disposition n’a été prise pour faire face aux réclamations formulées par le Maire de la Commune de Kaneye, alors que les clauses contractuelles du marché prévoient que l’entrepreneur est tenu, Pendant le délai de garantie, l’entrepreneur est tenu à une obligation de parfait achèvement, en vertu de laquelle il doit remédier à toutes les défectuosités signalées par le maître d’ouvrage ou le bureau d’études et de contrôle, de sorte que l’ouvrage soit conforme à l’état dans lequel il se trouvait au moment de la réception provisoire.
Par ailleurs, le Bureau d’Etudes Techniques et de Gestion de Projets (BGET), chargé de l’étude et du contrôle des travaux, objet dudit marché, n’a pris aucune initiative pour signaler les défauts de l’ouvrage. Il a également procédé à la validation des trois comptes relatifs au paiement de 80 564 275 FCFA. Par ailleurs, il a participé à la réception technique des travaux le 16 juillet 2018 à Kaneye.
En outre, la retenue de garantie d’un montant de 4,2 millions de FCFA (4 240 225F) a été versée par le Directeur de lAGETIER à l’entreprise. De plus, LAGETIER n’a rien fait pour mobiliser la retenue de garantie versée par la société. Le montant total compromis est de 24.597.500 FCFA.
Plus grave encore, selon le rapport d’audit, le DG de l’AGETIER, Zana Coulibaly, a régulièrement payé un bureau d’audit qui n’a pas rempli ses obligations contractuelles.
Ainsi, il ressort des audits que le Bureau d’Etudes Techniques et de Gestion de Projets (BGET), chargé des études et du contrôle des travaux de construction du pont de Kaneye, n’a pas rempli correctement ses obligations contractuelles en matière de contrôle et de surveillance des travaux. Pire encore, ledit bureau n’a signalé dans aucun de ses rapports une situation d’inexécution ou de mauvaise exécution des travaux susceptible de mettre en péril la solidité de l’ouvrage. En outre, il a approuvé tous les comptes de paiement de l’entreprise chargée des travaux ; il a établi et signé les documents de réception technique et provisoire des travaux de construction du pont de Kaneye.
Par ailleurs, il ressort du procès-verbal de réception technique établi le 16 juillet 2018 par le Bureau d’études techniques et de gestion de projets, notamment après une visite contradictoire des tâches exécutées par l’entreprise et les vérifications techniques nécessaires, que la commission (composée des représentants du bureau de contrôle et de l’entreprise) a procédé à la réception technique des travaux sans réserve.
Par ailleurs, il ressort du procès-verbal de réception provisoire établi le 7 août 2018 et signé par les représentants de PRRE ; AGETIER ; du bureau de contrôle BGET ; de l’entreprise et du Maire ; de l’entreprise et du Maire de Kaneye qu’AGETIER en tant qu’Entrepreneur Général a approuvé, sans réserve, le document attestant de la bonne exécution des travaux du Pont 22 à Kaneye, même si l’ouvrage présentait des défauts, et a été achevé le 1er mars 2019 (voir photo) avant l’expiration du délai de garantie, soit sept (07) mois après sa réception provisoire. Le montant total payé par le directeur général d’AGETIER, Zana Coulibaly, au bureau de contrôle du BGET pour ses prestations, alors qu’il n’a pas rempli ses obligations contractuelles relatives au contrôle et à la surveillance des travaux, s’élève à plus de 23 millions de FCFA (23 437 000F).
Selon une source, avec la mauvaise application des pénalités de retard pour les périodes 2018, 2019 et 2020, AGETIER aurait subi une perte d’environ 800 millions de FCFA représentant les montants des obligations nationales non remboursées et recouvrées.
PRRE et LAGETIER victimes de leurs dirigeants
Aujourd’hui, avec la mauvaise gestion actuelle du PRRE et de lAGETIER, le Mali risque d’être endeuillé par la mise en place de certaines infrastructures rurales et agricoles.
Et si le gouvernement ordonnait, sans complaisance ni préjugé, un audit approfondi de tous les services du PRRE et de lAGETIER, peut-être découvrirait-on un vaste réseau mafieux savamment créé pour piller les fonds publics.
Selon nos sources, ces petits escrocs du PRRE et de l’AGETIER ne cessent de causer d’énormes dégâts à l’Etat malien par leur façon d’agir. A travers leur façon d’agir, on constate qu’au niveau de ces deux services de l’Etat, les anciennes amours sont toujours présentes dans les têtes des responsables de ces entités administratives. PRRE et AGETIER sont en proie à des scandales sans précédent. Tout d’abord, l’éthique et la déontologie sont bafouées depuis des années. L’arrivée de la Coordinatrice Oumarou Camara au PRRE et de la DG Zana Coulibaly à l’AGETIER a permis de réglementer les pratiques frauduleuses dans ces structures. Normalement, la réglementation conduit à une application stricte, mais aujourd’hui, nous assistons à des fraudes et des vols sans précédent au sein de ces deux services.
A qui profite ce genre d’activités mafieuses ? Et tout le monde se demande si le président Assimi, qui a promis de mener une lutte acharnée contre la corruption, ne sera pas impliqué.
Ce qui, loin de troubler l’ordre public (comme le signaleraient les mafiosi de la République), sonnerait comme une véritable alarme aux oreilles du ministre de l’Economie et du ministre du Développement rural. En effet, si les deux ministres veulent tenir la distance, ils feraient mieux de clarifier les affaires en cours chez PRRE et AGETIER. Il en va aussi de leur crédibilité, même si leurs actions peuvent cacher d’autres affaires gérées par des proches. A moins qu’ils ne veuillent suivre l’exemple de certains de leurs prédécesseurs et devenir ministres du gouvernement.
En tout cas, au ministre de l’Economie et des Finances et au ministre du Développement rural, vous avez un excellent dossier sur votre bureau. Il suffit d’employer les enquêteurs. Et vous pourrez venger les adversaires de la République.
Par ailleurs, il faut noter que la Banque mondiale, censée contrôler les investissements du PRRE, est aujourd’hui obnubilée par le coordonnateur du PRRE, Oumarou Camara. Il a déjà trompé ce partenaire stratégique dans le cadre du Plan de Développement Intégré de la Région Centrale (PSIRC) qui a démarré en 2021 ; et en 2023, aucune mise en œuvre sur le terrain n’est encore visible. Et s’il doit encore piloter le PRRE, le même scénario de prolongation sans résultats tangibles se répétera. C’est un danger pour le développement des régions en crise de notre pays.
En définitive, les résultats du PRRE sur le terrain sont mensongers. Mais pourquoi de nombreux projets PRRE ne fonctionnent-ils pas, comme les postes routiers de Gao, Tombouctou et Douentza ? Et pourquoi le coordinateur du PRRE, Oumarou Camara, refuse-t-il de livrer du matériel agricole aux agriculteurs du PIV de Sindiwara Ansongo, malgré leur demande, à partir du 16 août 2022 pour les besoins de la campagne agricole 2022-2023 ?
Autant de questions auxquelles nous répondrons dans le prochain numéro.
Jean Pierre James